venerdì 18 settembre 2009

Une soirée particulière, par Franck Nouchi

Mardi en Italie, une émission a été déprogrammée à la demande du président du conseil,Silvio Berlusconi, de manière à lui assurer une forte audience sur une autre chaîne de télévision. Vous n'y croyez pas ? Reportez-vous, dans Le Monde du 17 septembre, à l'article de notre correspondant à Rome, Philippe Ridet.

Afin qu'un maximum d'Italiens assistent, surRai Uno, à l'inauguration, par lui-même, des premières maisons antisismiques destinées aux sans-abri du tremblement de terre de L'Aquila, l'homme le plus riche et le plus puissant d'Italie a convaincu les responsables d'une chaîne concurrente, Rai Due, de renoncer à la diffusion d'une émission polémique très regardée.

Boîte à lettres, draps, dentifrice, huile d'olive, télévision à écran plat, rien ne manquait, paraît-il, dans les 94 maisonnettes. "Voici les clefs dans l'espoir que cette maison soit pour vous un nid d'amour en vue d'une nouvelle vie", déclara Silvio Berlusconi à l'attention d'un jeune couple.

En regardant ces images de propagande, on éprouvait un sentiment de tristesse. Pour les 11 000 sinistrés qui vivent encore dans des tentes auxquels s'ajoutent 25 000 personnes logées dans des hôtels de la côte Adriatique ; mais aussi pour les Italiens, massés devant leur poste de télévision, à qui l'on infligeait une telle mise en scène.

Mercredi 16, dans La Repubblica, le quotidien le plus en pointe dans la dénonciation du système Berlusconi, pas moins de huit pages étaient consacrées à ce show et aux tentatives de mise au pas des médias italiens. Du moins ceux qui ne sont pas encore tombés sous la coupe du président du conseil.

Pendant ce temps, en France, nous regardions benoîtement, sur TF1, le Milan AC battre l'OM. Les commentateurs faisaient leur boulot de commentateurs de foot. Normal. Reste qu'il devient aujourd'hui impossible de faire comme si nous ne savions pas qu'un homme, accessoirement président du Milan AC, cherche à museler la presse de son pays. Intervenant en mai 1977 auFestival de Cannes à l'occasion d'un colloque sur "l'engagement social et économique du cinéma", le grand cinéaste italien Roberto Rossellini avait déclaré : "Je voudrais maintenant citer une phrase de Marx, à laquelle j'ajouterai la mienne. Karl Marx disait : "L'ignorance n'a jamais servi à personne" ; et moi j'ajoute : "L'ignorance sert très bien ceux qui veulent nous tenir en laisse." J'ai 71 ans, je tiens debout et je continue à casser les pieds à tout le monde. J'avais pourtant le choix. J'ai connu le succès ; je suis devenu une star, j'aurais pu en profiter, vivre à partir de là sans chercher les ennuis puisque je m'amusais bien dans la vie. Mais j'ai préféré revenir casser les pieds. Je suis né libre ; heureusement. Je suis libre, totalement libre..."

Une proclamation que La Repubblica pourrait tout à fait reprendre à son compte.

Franck Nouchi LE MONDE | 17.09.09

http://www.lemonde.fr/opinions/article/2009/09/17/une-soiree-particuliere-par-franck-nouchi_1241811_3232.html#xtor=AL-32280184

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